
De toutes les mesures adoptées par nos instances officielles dans la dernière période, la plus scandaleuse et la plus inique qui soit est bien ce privilège accordé par le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel, réd.) à TF1 de prolonger de deux minutes les spots publicitaires lors de la coupure des films. Les spécialistes s’accordent à reconnaître que cette disposition, si elle est appliquée, constituera un nouvel avantage de plus d’un milliard de francs (francs français, réd.) pour la chaîne privée.
Il s’agit là d’une infamie comme on n’en a pas connu depuis bien longtemps et qui constitue une prime exorbitante à la médiocrité, à la démagogie dégoulinante et à la bêtise, érigées en valeurs suprêmes. C’est un euphémisme, car ces gens-là sont des orfèvres, des alchimistes qui sont arrivés à transformer la connerie à l’état brut en étalon-or. Personne n’y était parvenu jusque-là ; ils l’ont fait !
Ainsi, dans la partie de bras de fer qui met aux prises Gutenberg et McLuhan depuis bien des années, un nouveau personnage est apparu qui vient de tirer à bout portant sur le vénérable père de l’imprimerie. Il a beau s’avancer masqué, nous l’avons tous reconnu : il s’agit du président du CSA, Hervé Bourges, à qui l’on peut attribuer le double titre d’assassin de Gutenberg et d’étrangleur de la presse écrite.
Car c’est bien de la deuxième mort de Gutenberg qu’ il est question.
En effet, dans la période de crise que nous traversons, le transfert de ce milliard de ressources publicitaires vers la télévision, privée de surcroît, ne manquera pas de faire cruellement défaut à tous les quotidiens, dont beaucoup sont déjà dans de grandes difficultés. Combien devront mettre le genou à terre après cette mesure aussi inique que grotesque. A moins qu’à nouveau l’Etat vache à lait ne mette la main au porte-monnaie des contribuables pour sauvegarder un espace de démocratie par de nouvelles subventions publiques.

Daumier / Bibliothèque Nationale d’Estampes.
De cette façon, on tord encore un peu plus le cou à la démocratie pluraliste en tournant le dos délibérément à l’avancée de la culture et de l’écrit dans notre pays. Toutes choses que le CSA était censé protéger de par sa vocation.
Par quelle perversion de l’esprit son actuel président a-t-il pu transformer cette honorable institution de contrôle et de régulation en ce machin devenu inutile et ruineux ?
Dans cette circonstance, non seulement le CSA ne contrôle ni ne régule plus rien, mais de plus il aggrave les dysfonctionnements existants.
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